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Lettres de nos poilus.

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Message  Invité Ven 7 Nov 2008 - 18:17

Le 3 août 1914, l'Allemagne déclare la guerre à la France. Tous espérent que les hostilités seront de courte durée mais le conflit se prolonge. Cette guerre moderne, pour laquelle on met au point de nouvelles armes redoutables, durera quatre ans et laissera derrière elle des millions de morts et d'invalides, soldats et civils.

Lettre d'un poilu :

Portrait de l'auteur de la lettre.
En 1914, Jean Déléage est marié, a 38 ans, est père de deux enfants et exerce la profession d'inspecteur de l'école primaire.

Mercredi 29 septembre 1915
Ma chère Louisette,
Je t'ai promis, presque solennellement, de te dire la vérité ; je vais m'exécuter, mais en revanche tu m'as donné l'assurance que tu aurais les nerfs solides et le coeur ferme.
Je suis depuis ce matin dans des tranchées conquises depuis 2 jours, l'ensemble de ces tranchées et boyaux forme un véritable "labyrinthe", où j'ai erré 3 heures cette nuit, absolument perdu. Les traces de la lutte ardente y sont nombreuses et saisissantes ; et d'abord elles sont plus qu'à moitié détruites par l'ouragan de mitraille que notre artillerie y a lancé, aussi sont-elles incommodes et horriblement sâles malgré les réparations urgentes que nous y avons faites ; tout y manque : l'eau (propre ou sale), les boyaux, les latrines ; elles sont à moins de 200 mètres de la 1ère ligne ennemie, avec laquelle elles communiquent par des boyaux obturés ; elles sont parsemées de cadavres français et allemands ; sans presque me déranger j'en compte bien 20 figés dans les attitudes les plus macabres. Ce voisinage n'est pas encore nauséabond, mais il fait tout de même mal aux yeux ; ce matin, à 5 heures, nous arrivons mouillés et harassés, et j'entre dans le premier abri venu pour me détendre, j'avise une bonne planche, m'y étends, la trouve moelleuse, mais 5 minutes après je m'aperçois qu'elle fait sommier sur 2 cadavres allemands ; et bien, crois-moi, ça fait tout de même quelque chose, au moins la 1ère fois. On marmite fort tout autour de nous et vraiment c'est parfois un vacarme ; déjà je ne salue presque plus.
Le mal n'est pas là ; il est surtout dans le temps qui est affreux ; depuis 3 jours au moins, les rafales de pluie succèdent aux averses ; les boyaux sont des fondrières inommables, où l'on glisse, où l'on se crotte affreusement ; aussi suis-je sâle au superlatif, au moins jusqu'à la ceinture ; mes mains sont boueuses et les resteront jusqu'au départ ; mes souliers sont pleins d'eau ; heureusement le corps est sec, car l'air est presque froid et le ciel livide. Autour de moi les gens font une tête ! Il nous faudra beaucoup de patience et de moral.
Nous sommes coiffés du nouveau casque en tôle d'acier ; c'est lourd et incommode, mais cela donne une sérieuse protection contre les éclats de fusants et contre les ricochets, aussi le porte-t-on sans maugréer. Nous avons aussi tout un attirail contre les gaz asphyxiants. Mais nous serons mal ravitaillés : un seul repas, de nuit, qui arrivera froid le plus souvent ; et cela s'explique à la fois par la longueur des boyaux et par la difficulté de parcourir une large zone découverte.
A ce tableau un peu sombre mais véridique il convient d'ajouter deux correctifs ; d'abord nous aurons un rôle défensif, nous sommes chargés de mettre en état le secteur très bouleversé ; ensuite les Allemands contre-attaquent peu, par suite du manque d'effectifs et de l'état de leurs affaires en Champagne. Pour ces 2 raisons, il se pourrait très bien que nous n'ayons pas à les regarder dans les yeux ; c'est d'ailleurs le voeu unanime ici.
Ma lettre va t'arriver en pleine période de réinstallation et de soucis ; j'essayerai d'en prendre ma part de loin ; cela me distraira et me fondra un peu plus avec vous. Je te souhaite du calme et du courage pour triompher de ces petites difficultés.
Tu sais combien je t'aime et quels tendres baisers je t'envoie, partage avec nos chers petits.
(signé) Déléage
P.S. J'approuve absolument ta décision relative à la gentille offre de Catherine.
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Message  Annick Ven 7 Nov 2008 - 20:09

Les échanges de correspondance étaient très émouvants durant ces années de guerre.

J'ai conservé les lettres que mon grand-père écrivait à ma grand-mère.
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Message  Invité Ven 7 Nov 2008 - 22:25

Merci pour ton passage Annick

J'avais retrouvé une lettre de mon grand père adressée à ma grand-mère, il est décédé peu de temps après son retour de la guerre, il avait 33 ans et trois jeunes enfants. Crying or Very sad
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Message  Invité Ven 7 Nov 2008 - 22:32

Ma bien chère petite Alice

Nous sommes de nouveau en réserve pour quatre jours, au village des Brebis.
Le service tel qu'il est organisé maintenant est moins fatigant.
Quatre jours aux tranchées, quatre jours en réserve.
Nos quatre jours de tranchées ont été pénibles à cause du froid et il a gelé dur, mais les Boches nous ont bien laissés tranquilles.
Le jour de Noël, ils nous ont fait signe et nous ont fait savoir qu'ils voulaient nous parler.
C'est moi qui me suis rendu à 3 ou 4 mètres de leur tranchée d'où ils étaient sortis au nombre de trois pour leur parler.
Je résume la conversation que j'ai dû répéter peut-être deux cents fois depuis à tous les curieux.
C'était le jour de Noël, jour de fête, et ils demandaient qu'on ne tire aucun coup de fusil pendant le jour et la nuit, eux-mêmes affirmant qu'ils ne tireraient pas un seul coup.
Ils étaient fatigués de faire la guerre, disaient-ils, étaient mariés comme moi (ils avaient vu ma bague), n'en voulaient pas aux Français mais aux Anglais.
Ils me passèrent un paquet de cigares, une boîte de cigarettes bouts dorés, je leur glissai Le petit parisien en échange d'un journal allemand et je rentrai dans la tranchée française où je fus vite dévalisé de mon tabac boche.
Nos voisins d'en face tinrent miuex leur parole que nous.
Pas un coup de fusil.
On put travailler aux tranchées, aménager les abris comme si on avait été dans la prairie Sainte-Marie.
Le lendemain, ils purent s'apercevoir que ce n'était plus Noël, l'artillerie leur envoya quelques obus bien sentis en plein dans leur tranchée.
Nous voilà aux Brebis maintenant.
Faillaut a invité hier tous les chefs de section.
Repas merveilleux qui a dû lui coûter cher.
J'ai trouvé un lit chez une bonne vieille où je me repose comme une marmotte.
Fais part de mes amitiés à tous.
Mes meilleures caresses aux petites, et à toi mes plus affectueux baisers.


Gustave

Gustave Berthier était un instituteur de la région de Chalo-sur-Saône, tout comme sa femme à laquelle il était marié depuis 1911.
Ils habitaient Sousse, en tunisie.
Mobilisé en août 1914, Gustave a été tué le 7 juin 1915 à Bully-les-Mines.
Il avait vingt-huit ans.
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Message  janine Ven 7 Nov 2008 - 23:15

C'est terrible de penser que des familles ont vécu cette horrible guerre et malheureusement les hommes ne tirent jamais de leçon. Ca recommence toujours...

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janine
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Message  Invité Dim 9 Nov 2008 - 20:48

L’orthographe du document est respectée

"Le 13 septembre 1916,

Mon cher Gérard,

Je viens de recevoir ton aimable babille et suis heureux que tu est pû avoir une petite permission pour voir ton deuzième enfant. Quant a moi je suis toujours en prévention et compte passé Samedi en conseil. Je ne sais ce qu’ils font me faire, mais s’ils veulent me faire plaisir, ils n’ont qu’a me fusiller car j’en est assez de cette injustice. Je suis la victime d’un de mes chers lieutenant, mais si malheureusement après ma condamnation je suis victime d’une autre insolent comme celui-ci je ne sais trop a qui je irais car je suis a bout. En plus de cela ma mère est au lit, et je craints une issue fatale pour elle. C’est elle qui me retient quand elle n’existera plus, moi seule déciderait du reste, car la patience est à bout. J’aurais bien fait venir le député de chez nous qui est bon avocat et qui ne s’en serait que fait un plaisir, mais j’est peur que ma mère vienne à l’apprendre. Enfin si je suis condamné injustement je n’esiterai pas a le faire venir car ma vie civile pourrait être atteinte par l’injustice militaire. Enfin j’espère que tu as passer trois jours heureux et que toute ta famille est en bonne santé. Si tu me r’écrit pas avant samedi voila mon adresse : Prévoté de 12e division Section Postale C° 33e. Quand a la vie militaire tu as une idée si je veux rester au régiment je ne peux te dire ce que j’en pense sur cette carte du régiment mais mon vieux avoir enduré ce que j’est enduré pendant trois mois a cause d’une manille tu doit savoir ce que j’en pense. N’as tu plus eu des nouvelles de Chabal et de Rouzey, sont-ils bien été tué ? Je te serre une cordiale poignée de mains et t’envoi mes meilleurs souvenirs pour ta famille.
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Message  Invité Mar 11 Nov 2008 - 17:45

celle ci est particulièrement bouleversante :

Verdun,
Le 18 mars 1916,
Ma chérie,
Je t'écris pour te dire que je ne reviendrai pas de la guerre. S'il te plaît, ne pleure pas, sois forte. Le dernier assaut m'a coûté mon pied gauche et ma blessure s'est infectée. Les médecins disent qu'il ne me reste que quelques jours à vivre. Quand cette lettre te parviendra, je serai peut-être déjà mort. Je vais te raconter comment j'ai été blessé.
Il y a trois jours, nos généraux nous ont ordonné d'attaquer. Ce fut une boucherie absolument inutile. Au début, nous étions vingt mille. Après avoir passé les barbelés, nous n'étions plus que quinze mille environ. C'est à ce moment-là que je fus touché. Un obus tomba pas très loin de moi et un morceau m'arracha le pied gauche. Je perdis connaissance et je ne me réveillai qu'un jour plus tard, dans une tente d'infirmerie. Plus tard, j'appris que parmi les vingt mille soldats qui étaient partis à l'assaut, seuls cinq mille avaient pu survivre grâce à un repli demandé par le Général Pétain.
Dans ta dernière lettre, tu m'as dit que tu étais enceinte depuis ma permission d'il y a deux mois. Quand notre enfant naîtra, tu lui diras que son père est mort en héros pour la France. Et surtout, fais en sorte à ce qu'il n'aille jamais dans l'armée pour qu'il ne meure pas bêtement comme moi.
Je t'aime, j'espère qu'on se reverra dans un autre monde, je te remercie pour tous les merveilleux moments que tu m'as fait passer, je t'aimerai toujours.
Adieu
Soldat Charles Guinant
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Message  Invité Mar 11 Nov 2008 - 17:47

La connerie de cette guerre et de ses chefs.....

Lettre d'Henri Floch fusillé pour l'exemple à Vingré. Le caporal Henri Floch était greffier de la justice de paix à Breteuil.

Ma bien chère Lucie, Quand cette lettre te parviendra, je serai mort fusillé.

Voici pourquoi : Le 27 novembre, vers 5 heures du soir, après un violent bombardement de deux heures, dans une tranchée de première ligne, et alors que nous finissions la soupe, des Allemands se sont amenés dans la tranchée, m'ont fait prisonnier avec deux autres camarades. J'ai profité d'un moment de bousculade pour m'échapper des mains des Allemands. J'ai suivi mes camarades, et ensuite, j'ai été accusé d'abandon de poste en présence de l'ennemi.

Nous sommes passés vingt-quatre hier soir au Conseil de Guerre. Six ont été condamnés à mort dont moi. Je ne suis pas plus coupable que les autres, mais il faut un exemple. Mon portefeuille te parviendra et ce qu'il y a dedans.

Je te fais mes derniers adieux à la hâte, les larmes aux yeux, l'âme en peine. Je te demande à genoux humblement pardon pour toute la peine que je vais te causer et l'embarras dans lequel je vais te mettre...

Ma petite Lucie, encore une fois, pardon.

Je vais me confesser à l'instant, et j'espère te revoir dans un monde meilleur. Je meurs innocent du crime d'abandon de poste qui m'est reproché. Si au lieu de m'échapper des Allemands, j'étais resté prisonnier, j'aurais encore la vie sauve. C'est la fatalité

Ma dernière pensée, à toi, jusqu'au bout. Henri Floch
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Message  Annick Mar 11 Nov 2008 - 17:58

Aujourd'hui, j'ai relu quelques lettres de mon grand-père adressées à ma grand-mère, à ses parents.

Il ne se plaignait jamais, mais s'inquiétait toujours de savoir si son fils, (mon père) tout petit, allait bien.
Comme ils étaient agriculteurs, il se tracassait pour les travaux des champs et était désolé de ne pas être près d'eux.
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Message  Invité Mar 11 Nov 2008 - 18:10

C'étaient des hommes très courageux, certaines de ces lettres sont vraiment bouleversantes.
Merci de ton passage Annick Smile
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Message  Invité Mer 12 Nov 2008 - 10:15

Encore une lettre bouleversante qui démontre la folie de cette guerre et la folie de ses chefs.
J'ai regardé le téléfilm hier soir et ce cette révolte, il en était question, mais quelle connerie la guerre.....

Léonie chérie
J’ai confié cette dernière lettre à des mains amies en espérant qu’elle t’arrive un jour afin que tu saches la vérité et parce que je veux aujourd’hui témoigner de l’horreur de cette guerre.

Quand nous sommes arrivés ici, la plaine était magnifique. Aujourd’hui, les rives de l’Aisne ressemblent au pays de la mort. La terre est bouleversée, brûlée. Le paysage n’est plus que champ de ruines. Nous sommes dans les tranchées de première ligne. En plus des balles, des bombes, des barbelés, c’est la guerre des mines avec la perspective de sauter à tout moment. Nous sommes sales, nos frusques sont en lambeaux. Nous pataugeons dans la boue, une boue de glaise, épaisse, collante dont il est impossible de se débarrasser. Les tranchées s’écroulent sous les obus et mettent à jour des corps, des ossements et des crânes, l’odeur est pestilentielle.
Tout manque : l’eau, les latrines, la soupe. Nous sommes mal ravitaillés, la galetouse est bien vide ! Un seul repas de nuit et qui arrive froid à cause de la longueur des boyaux à parcourir. Nous n’avons même plus de sèches pour nous réconforter parfois encore un peu de jus et une rasade de casse-pattes pour nous réchauffer.
Nous partons au combat l’épingle à chapeau au fusil. Il est difficile de se mouvoir, coiffés d’un casque en tôle d’acier lourd et incommode mais qui protège des ricochets et encombrés de tout l’attirail contre les gaz asphyxiants. Nous avons participé à des offensives à outrance qui ont toutes échoué sur des montagnes de cadavres. Ces incessants combats nous ont laissé exténués et désespérés. Les malheureux estropiés que le monde va regarder d’un air dédaigneux à leur retour, auront-ils seulement droit à la petite croix de guerre pour les dédommager d’un bras, d’une jambe en moins ? Cette guerre nous apparaît à tous comme une infâme et inutile boucherie.
Le 16 avril, le général Nivelle a lancé une nouvelle attaque au Chemin des Dames. Ce fut un échec, un désastre ! Partout des morts ! Lorsque j’avançais les sentiments n’existaient plus, la peur, l’amour, plus rien n’avait de sens. Il importait juste d’aller de l’avant, de courir, de tirer et partout les soldats tombaient en hurlant de douleur. Les pentes d’accès boisées, étaient rudes .Perdu dans le brouillard, le fusil à l’épaule j’errais, la sueur dégoulinant dans mon dos. Le champ de bataille me donnait la nausée. Un vrai charnier s’étendait à mes pieds. J’ai descendu la butte en enjambant les corps désarticulés, une haine terrible s’emparant de moi.
Cet assaut a semé le trouble chez tous les poilus et forcé notre désillusion. Depuis, on ne supporte plus les sacrifices inutiles, les mensonges de l’état major. Tous les combattants désespèrent de l’existence, beaucoup ont déserté et personne ne veut plus marcher. Des tracts circulent pour nous inciter à déposer les armes. La semaine dernière, le régiment entier n’a pas voulu sortir une nouvelle fois de la tranchée, nous avons refusé de continuer à attaquer mais pas de défendre.
Alors, nos officiers ont été chargés de nous juger. J’ai été condamné à passer en conseil de guerre exceptionnel, sans aucun recours possible. La sentence est tombée : je vais être fusillé pour l’exemple, demain, avec six de mes camarades, pour refus d’obtempérer. En nous exécutant, nos supérieurs ont pour objectif d’aider les combattants à retrouver le goût de l’obéissance, je ne crois pas qu’ils y parviendront.
Comprendras-tu Léonie chérie que je ne suis pas coupable mais victime d’une justice expéditive ? Je vais finir dans la fosse commune des morts honteux, oubliés de l’histoire. Je ne mourrai pas au front mais les yeux bandés, à l’aube, agenouillé devant le peloton d’exécution. Je regrette tant ma Léonie la douleur et la honte que ma triste fin va t’infliger.
C’est si difficile de savoir que je ne te reverrai plus et que ma fille grandira sans moi. Concevoir cette enfant avant mon départ au combat était une si douce et si jolie folie mais aujourd’hui, vous laisser seules toutes les deux me brise le cœur. Je vous demande pardon mes anges de vous abandonner.
Promets-moi mon amour de taire à ma petite Jeanne les circonstances exactes de ma disparition. Dis-lui que son père est tombé en héros sur le champ de bataille, parle-lui de la bravoure et la vaillance des soldats et si un jour, la mémoire des poilus fusillés pour l’exemple est réhabilitée, mais je n’y crois guère, alors seulement, et si tu le juges nécessaire, montre-lui cette lettre.
Ne doutez jamais toutes les deux de mon honneur et de mon courage car la France nous a trahi et la France va nous sacrifier.
Promets-moi aussi ma douce Léonie, lorsque le temps aura lissé ta douleur, de ne pas renoncer à être heureuse, de continuer à sourire à la vie, ma mort sera ainsi moins cruelle. Je vous souhaite à toutes les deux, mes petites femmes, tout le bonheur que vous méritez et que je ne pourrai pas vous donner. Je vous embrasse, le cœur au bord des larmes. Vos merveilleux visages, gravés dans ma mémoire, seront mon dernier réconfort avant la fin.

Eugène ton mari qui t’aime tant
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